La pénurie de beurre dans les rayons des GMS n’est pas liée à une baisse de la production de lait

21 octobre 2021 Pierre Perrin-Monlouis

Les prix du beurre au niveau mondial ont flambé depuis le printemps 2016, passant de 2 500 €/t à 7 000 €/t récemment, tirés vers des sommets par la fermeté de la demande mondiale. Ainsi, même si les rayons des GMS se clairsement dans l’hexagone et qu’une frénésie acheteuse s’empare des consommateurs, les exports européens de beurre (Allemagne et France) se portent plutôt bien. Cette situation paradoxale montre clairement que des arbitrages ont été effectués en raison d’un problème de juste valorisation du beurre dans les canaux traditionnels de distribution en France. Peut-on arriver à une pénurie totale de beurre d’ici à la fin de l’année alors que la collecte de lait est au rendez-vous en France et en Europe?
Paris, le 26 octobre 2017- « La forte hausse des prix du beurre est liée à un déséquilibre entre l’offre et la demande mondiale en matière grasse. Si l’on exclut l’Inde, la production mondiale de beurre devrait augmenter cette année de près de 7 000 tonnes quand la consommation est attendue en hausse de plus de 50 000 tonnes notamment en Asie du Sud-est et aux USA. » explique Pierre Begoc, directeur des affaires internationales chez Agritel.
En Europe, la production de beurre est de 1.4 Mt sur la période de janvier à août 2017, en baisse de -4 % par rapport à 2016. Ce léger repli est à associer à un recul de la production néozélandaise et à une disparition de l’offre américaine désormais dédiée à la fourniture des besoins domestiques. Ainsi, comme les 3 principaux offreurs de beurre dans le monde n’ont pas les moyens ou l’envie (au choix) de produire plus de beurre, les prix de cette matière première flambent. La frilosité relative des industriels vis-à-vis de la production de beurre s’explique également par les difficultés rencontrées par ces derniers pour valoriser l’autre membre du complexe : la poudre de lait écrémé. En effet, ce coproduit, indissociable de la fabrication du beurre et riche en protéines, ne bénéficie pas du même dynamisme de la demande. Dès lors, les stocks s’amoncellent et prennent la forme d’une montagne de poudre appartenant à la commission européenne qui utilise l’ancien mécanisme des achats d’intervention pour désengorger le marché communautaire. Cela conduit donc les industriels à faire des arbitrages qui ne vont pas forcément en faveur d’une augmentation de la production de beurre. Pourtant, les volumes de lait sont là et la période hivernale est synonyme d’une matière première plus grasse. Pour rappel, ces derniers sont stables depuis le début de l’année 2017 voire en augmentation sur les deux mois d’été par rapport à 2016.
La raréfaction du beurre dans les linéaires des GMS est aussi la conséquence de modes de contractualisation qui ne sont plus adaptés à la volatilité touchant les matières premières, incitant les industriels à aller chercher une meilleure valorisation à l’export plutôt que via des engagements à prix fixes avec la grande distribution française qui ne permettent pas d’ajustement de prix en fonction des cours mondiaux. Dans le même temps, les acheteurs de beurre (industries, pâtisseries, …) ont voulu assurer l’approvisionnement pour les fêtes de fin d’année, provoquant une amplification de la demande. Les consommateurs peuvent toutefois être rassurés, maintenant que les principaux volumes sont contractualisés pour la fin d’année, les prix du beurre sont déjà en baisse comme constaté sur les différentes échéances des marchés à terme et autres plateformes de cotation. Certains us et coutumes des filières sont donc à dépoussiérer car la volatilité est là, bien installée et il faudra le faire avec en utilisant de nouveaux outils de couverture.

Photo of author
Trader & Analyste Financier
Fondateur de Rente et Patrimoine et à la tête du service Bourse Trading, il vous fait profiter de son expérience en trading grâce à ses analyses financières et décrypte pour vous les actualités des marchés. Son approche globale des marchés combine à la fois l'analyse technique et fondamentale.