21 octobre 2021 Pierre Perrin-Monlouis
Les bonus des traders font couler beaucoup d’encres en temps de crise. Autant leurs rémunérations semblent normales et logiques en période d’euphorie boursière, autant elles semblent iniques en période de krach boursier. La crise économique de 2008-2009 a mis les rémunérations des traders sur le devant de la scène, et les critiques ont fusé, certains n’hésitant pas à expliquer la crise par cette seule rémunération.
Qui est concerné par ces bonus ? Certes les traders sont sans doute les plus grands gagnants de ces bonus mais ils ne sont pas les seuls. Ainsi tous les opérateurs d’une salle de marché peuvent percevoir des bonus. Du petit opérateur au salesman en passant bien sur par le très médiatique trader. Les bonus peuvent donc concerner plusieurs milliers de personnes dans les plus grandes banques, même si en pratique, les traders en sont les plus grands bénéficiaires.
Comment se décompose la rémunération d’un trader ? Deux types de rémunérations sont perçues par le trader. D’une part, un montant fixe. Il s’agit d’un salaire de plusieurs dizaines de milliers d’euros par an. Certes ce montant peut sembler important mais la négociation salariale se porte essentiellement sur la part variable. En effet, la rémunération variable est essentielle pour les traders les plus expérimentés, et peut représenter plusieurs fois le salaire fixe. Une limitation de la partie variable se traduirait inévitablement par une pression accrue pour une hausse de la part fixe.
Comment se calcule un bonus ? Chaque année, la banque fixe à chaque équipe un budget Bonus. Le responsable de l’équipe doit alors répartir ce bonus en fonction des performances des salariés, mais également d’autres facteurs. Ainsi l’âge ou encore le charisme du trader peuvent influencer le montant du bonus. Au fil des années, plusieurs traders ont donc perçu des bonus bien supérieurs à ce qu’ils auraient gagné en se basant uniquement sur les profits réalisés. Ces bonus “garantis” augmentent donc la part fixe du trader.
Mais en pratique, les bonus représentent de 5% à plus de 10% des performances réalisées par les traders, et peuvent se chiffrer en millions d’euros. Toutefois les traders percevant plusieurs millions d’euros par an en France sont loin d’être légions.
Quel est le principal inconvénient du bonus ? Le bonus se calcule en grande partie sur les performances générées par le trader sur une période déterminée. Or à la fin de cette période, les opérations ne sont pas forcément débouclées, et les positions peuvent être encore ouvertes. La performance n’est alors que virtuelle. De plus, une forte performance en 2007 n’impliquera pas une aussi bonne performance en 2008. Si un trader fait gagner 5 millions d’euros à son employeur en 2007, il percevra un bonus de 250.000 euros. Mais en 2008, s’il fait perdre 10 millions d’euros, il ne devra pas rembourser son bonus de l’année précédente. Toutefois, il y a de fortes chances pour qu’il soit licencié. Le trader privilégiera donc les performances à court terme (1 an).
Quand est calculé le bonus ? Le bonus étant basé sur des performances passées, le bonus sera versé l’année suivant l’année de réalisation de ces performances. Ce décalage peut ainsi choquer. Le trader percevra ainsi en juin un bonus basé sur d’excellentes opérations réalisées au 1er trimestre de l’année précédente. Si la situation économique change fortement, le bonus n’est alors plus compris par le grand public.
Très critiqué, le bonus n’en est pas moins indispensable. Une limitation sans concertation au niveau d’un seul pays, se traduira inévitablement par un départ des meilleurs traders. Ces derniers étant totalement mobiles. Dans tous les cas, les traders n’accepteront sans doute pas une baisse de leur rémunération totale, et une baisse de la part variable devrait se traduire par une hausse notable du salaire fixe.