Gouvernement d’entreprises, de belles idées mais beaucoup de limites

21 octobre 2021 Pierre Perrin-Monlouis

Les scandales financiers à répétition ont détruit une bonne part de la confiance qu’avait les actionnaires vis à vis des entreprises cotées. Des comptes manipulés, des informations douteuses, du chiffre d’affaires inexistant, des retards de livraisons… autant de maux qui ont conduit les acteurs des marchés financiers à tenter d’améliorer les relations entre les actionnaires et les dirigeants.

A l’origine, le gouvernement d’entreprises ou corporate governance est destiné à la gestion et l’administration des entreprises en créant de nouveaux outils et organes de gestions. L’objectif est très clairement de diminuer l’influence de la direction au profit des conseils, comités et autres organes de l’entreprise. L’omniprésence des dirigeants explique une grande part des dérives constatées dans le monde financier. Il était donc nécessaire de surveiller davantage leurs opérations.

En France, il existe deux types principaux de directions pour les sociétés anonymes. D’une part, la société anonyme par conseil d’administration. D’un côté le directeur général gère le quotidien de l’entreprise, et de l’autre, le conseil d’administration qui avalise les propositions de la direction générale pour des opérations de plus grande envergure. Le directeur général peut aussi être le président du conseil d’administratif. Il y a alors cumul. Le conseil d’administration doit ainsi pouvoir prendre son indépendance vis à vis de son président, afin d’agir en toute indépendance, au profit des actionnaires et non du seul président. D’autre part, la société anonyme par directoire et conseil de surveillance. Le Directoire organise le quotidien et est contrôlé par le Conseil de Surveillance. Des tensions peuvent se créer au sein des deux organes. Dans tous les cas, la procédure de nomination des administrateurs influencera grandement l’indépendance de ces derniers. Il est d’usage que des présidents soient administrateurs d’autres sociétés dirigées par des individus administrateurs eux mêmes. La nomination d’administrateurs indépendants, liés aux salariés, ou aux petits porteurs se généralisent ainsi.

Au sens strict, la corporate governance régit les relations entre les actionnaires et la direction, et entre le conseil d’administration et la direction; Mais au sens large, le gouvernement d’entreprises intègre l’ensemble des acteurs liés à l’entreprise. Il s’agit bien évidemment des salariés, mais aussi des fournisseurs, des clients, des banques. L’environnement n’est pas non plus oublié et les conséquences des activités de l’entreprise sur l’environnement au sens large sont aussi prises en compte. Le terme de responsabilité sociétale est alors employé.

Depuis 1995 et le rapport Viénot, le gouvernement d’entreprises ne cesse de faire parler de lui en France. Le rapport Viénot traitait notamment de l’information des actionnaires, de l’indépendance des administrateurs, et de la création de comités. Un comité de rémunération peut ainsi être créé par l’entreprise afin de contrôler les rémunérations (stock options, bonus, golden parachute, golden hello, etc.) des dirigeants. Ces rémunérations parfois jugées excessives font souvent l’objet de critiques sévères de la société civile et des actionnaires. Le rapport Bouton de 2002 insiste lui sur l’éthique et la transparence financière.

Ces différents rapports et travaux ont abouti en mai 2001 à la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques ou NRE. Cette loi fixe de nombreuses dispositions mais si les sanctions sont faibles voire inexistantes. La loi NRE insiste ainsi sur l’indépendance des administrateurs face au président, une meilleure transparence financière, la création de valeur actionnariale, et la responsabilité sociétale pour les sociétés cotées. Chaque entreprise a un impact plus ou moins fort sur son environnement proche (écologie, taux de chômage, formation des personnels, etc.). La société doit donc publier un rapport sur son impact sur l’environnement social et écologique.

Aujourd’hui, deux visions du gouvernement d’entreprises sont retenues. Celle qui concerne principalement l’actionnaire. L’objectif est donc d’améliorer la valeur actionnariale. Il existe aussi une vision partenariale ou la création de valeur doit concernée l’ensemble des acteurs, allant de l’actionnaire aux salariés, en passant par les fournisseurs. Les nouveaux scandales financiers vont accroître un peu plus le poids des différents comités au sein des entreprises cotées.

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Trader & Analyste Financier
Fondateur de Rente et Patrimoine et à la tête du service Bourse Trading, il vous fait profiter de son expérience en trading grâce à ses analyses financières et décrypte pour vous les actualités des marchés. Son approche globale des marchés combine à la fois l'analyse technique et fondamentale.