Inflation, déflation, stagflation… un monde de flation

21 octobre 2021 Pierre Perrin-Monlouis

Problème majeur du début des années 80 en France, l’inflation a depuis été sévèrement jugulée pour ne plus être un problème sérieux même si les médias et les associations de consommateurs en font souvent leurs gros titres. L’inflation désigne la hausse des prix des biens de consommation, et se base sur l’Indice des Prix à la Consommation ou IPC. Cet indice permet de calculer chaque mois la hausse des prix constatée selon un panier moyen réparti dans tous les secteurs. Cet indice est toutefois souvent décrié car il ne reflète pas pour certains le panier de la ménagère. En effet, il prend en compte aussi bien le prix des carottes que celui de l’abonnement à internet.

L’Indice des Prix à la Consommation a été profondément remanié mais il reflète désormais clairement l’évolution réelle des prix. Certes, il est rare que les ménages s’y retrouvent car il s’agit d’un panier type qui doit prendre en compte tous les ménages et non un seul. Cet indice est primordial pour certains français car leurs revenus sont indexés ou fortement liés à l’inflation. C’est notamment le cas pour le RMI, le SMIC, les retraites ou encore les autres minima sociaux.

Cette quasi-indexation permet de conserver un pouvoir d’achat constant. En effet, à revenus identiques, toute inflation entraine inexorablement une baisse du pouvoir d’achat. Les prix augmentent, mais les revenus ne suivent pas la tendance. Ainsi le nombre de marchandises acquises diminue naturellement. L’inflation est donc souvent mal vécue par les ménages.

L’inflation provient du décalage pouvant exister entre l’augmentation de la masse monétaire et la production de biens et de services, soit entre la croissance nominale et la croissance réelle. Si la masse monétaire en circulation augmente plus vite que les marchandises produites, un décalage se forme et entraine une augmentation des prix. Il y a plus d’argent pour acheter le même nombre de marchandises, les prix augmentent donc. Ce phénomène est accentué par les anticipations des entreprises. Si une entreprise s’attend à une hausse du coût des matières premières dans les semaines ou mois à venir, elle aura tendance à augmenter dès aujourd’hui les prix de ses produits. Une des causes de cette augmentation est liée à la relative difficulté pour un industriel d’augmenter ses prix. Une entreprise ne peut augmenter ses prix le 4 janvier et les faire baisser le 18 janvier. Bien souvent ses clients ne comprendraient pas ses variations, et le coût de ses changements serait élevé (impression de catalogues, information du réseau de distribution, etc.).

L’inflation désigne la hausse des prix, mais il existe de nombreux autres phénomènes autour de l’indice des prix.

la déflation ou inflation négative
Ici les prix évoluent à la baisse. Nous sommes en présence de surproduction et tout naturellement les entreprises baissent les prix pour arriver à vendre leurs marchandises. La déflation peut être limitée à un seul secteur, comme le secteur immobilier ou automobile par exemple;

la désinflation
Le pays continue à voir ses prix augmenter mais de façon moins soutenue que par le passé. L’inflation baisse et s’approche du taux de 0%. Après les années de fortes inflations au début des années 80, l’inflation a fortement chuté et la France s’est trouvée en désinflation;

la stagflation
Une très mauvaise situation pour le pays. La croissance est faible voire très faible et l’inflation est très élevée;

l’hyperinflation
Plusieurs pays européens ont connu l’hyperinflation comme l’Allemagne, mais aujourd’hui le Mozambique est sans doute l’exemple type. Il s’agit selon Philip Cagan d’une inflation de plus de 50% par mois. Ici point question de payer les salariés au mois tant ils perdraient en pouvoir d’achat.

Les Etats et les banques centrales ont plusieurs outils pour juguler l’inflation. L’une de leurs armes préférées est sans nul doute celle des taux directeurs. L’essentiel de la création monétaire ne réside plus dans l’émission de billets mais dans la création de crédits. Les banques sont donc les véritables créatrices d’argent dans le monde. Pour limiter le montant des crédits distribués, la banque centrale peut accroître son taux directeur. Ce taux fixe le taux d’intérêt auquel emprunteront les banques pour prêter de l’argent. Plus ce taux est élevé, plus les taux des crédits seront élevés et moins d’individus ou d’entreprises emprunteront. Cela ralentira la création de monnaie, mais aussi les investissements.

L’inflation n’est ni bonne ni mauvaise en soi. La perception que vous en aurez dépendra en grande partie de votre situation économique. Plusieurs exemples pour illustrer ces propos.

Exportations : une société française exporte en Allemagne
Prenons le cas d’une entreprise française dont les relations commerciales avec l’Allemagne sont très fortes. Les deux pays utilisent l’euro comme devise, il n’existe donc aucun risque de change. Selon notre exemple fictif, la France a eu une inflation de 1,8% par an pendant 5 années, alors que l’Allemagne n’a eu qu’une inflation de 1,3%, soit une différence d’un demi-point.

Sur une année, la différence est faible, mais imaginez un produit vendu 5.600 euros en année n. Les entreprises allemandes achètent en France car le même produit est vendu 5.750 euros en Allemagne par les sociétés allemandes.

Mais au bout de 5 années, la produit français sera vendu 6.122,47 euros, soit une progression de 9,32%. Dans le même temps, le produit allemand sera vendu 6.133,59 euros. En seulement 5 années, et sans aucun effort, les entreprises allemandes affichent un prix quasi équivalent à notre entreprise française.

En pratique, les prix ne peuvent augmenter d’autant sur certains marchés tant la concurrence est rude. Les industriels se doivent donc d’améliorer fortement leur productivité pour afficher des prix stables. Dans notre exemple, les efforts que l’entreprise française devra fournir seront très nettement supérieurs aux entreprises allemandes pour simplement conserver son avantage tarifaire initial. L’inflation peut donc nuire fortement aux exportations d’un pays.

Prêt immobilier : un français acquiert un appartement
Le rêve de beaucoup de français est d’acquérir un appartement ou une maison. Mais savez vous que cette option peut vous permettre de profiter de l’inflation ? En effet, alors que les prix des loyers augmentent, le montant des échéances d’un prêt, pour peu que vous ayez choisi un taux fixe, n’évoluera pas dans le temps.

Ainsi si vous remboursez aujourd’hui 750 euros d’emprunt, à la fin de votre crédit dans 20 ans, vous rembourserez toujours 750 euros. Si dans le même temps, l’inflation a été de 1,5% par an, le montant réel de votre échéance ne sera que de 554 euros. En effet, x euros aujourd’hui valent plus que x euros demain. De fait, chaque année, le poids du remboursement de votre crédit baissera. Au bout de 20 années, vous constaterez une belle différence par rapport au prix du loyer.

Revenus : un français voit son salaire stable depuis dix années
Si un français n’a pas vu son salaire augmenter depuis dix années, et qu’il reste à 1500 euros par mois. Avec une inflation de seulement 1,5% par an, il voit son pouvoir d’achat baisser de plus de 210 euros. N’hésitez donc à pas négocier une hausse de salaire au moins équivalente à l’inflation.

L’inflation doit être mise en parallèle avec les revenus et le pouvoir d’achat pour permettre une analyse fine. Mais surtout n’oubliez pas que l’inflation prend en compte toutes vos dépenses et non le montant de vos courses alimentaires hebdomadaires.

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Trader & Analyste Financier
Fondateur de Rente et Patrimoine et à la tête du service Bourse Trading, il vous fait profiter de son expérience en trading grâce à ses analyses financières et décrypte pour vous les actualités des marchés. Son approche globale des marchés combine à la fois l'analyse technique et fondamentale.