Pierre Perrin-Monlouis Dernière mise à jour: 21 octobre 2021
Plusieurs milliards d’individus sur Terre n’ont pas accès au développement économique nécessaire pour vivre décemment. La répartition des richesses, les guerres ou encore les famines expliquent ces écarts entre populations. L’un de ces facteurs négatifs serait l’accès aux ressources financières. Le célèbre adage “on ne prête qu’aux riches” est malheureusement réel, au grand dam des populations les plus pauvres de la planète. C’est ce constat accablant qui s’est traduit par la création du micro crédit : Prêter de petites sommes à une population qui n’a pas accès aux réseaux bancaires classiques.
Dans les années 70, un professeur d’économie, Muhammad Yunus, organise un devoir pour ses étudiants. Leurs objectifs : cerner les besoins des fabricants de tabourets en bambous dans un quartier du Bangladesh. Le constat est sans appel. Un total de quelques dizaines de dollars US de l’époque permettait à 42 femmes d’améliorer leurs conditions de travail et leurs revenus. En effet, cette somme leur aurait permis de financer l’achat d’une année sur l’autre du bambou nécessaire à la construction des tabourets, et donc d’éviter les aléas des prix tout au long de l’année. Toutefois ces femmes n’avaient aucun moyen d’emprunter cette somme, si dérisoire soit-elle. Le secteur bancaire classique leur refusait tout crédit. D’une part à cause d’un risque d’insolvabilité élevé. Et d’autre part, à cause d’une rentabilité plus que limitée. Les frais de mise en place d’un tel crédit pouvant dépasser le montant même du crédit. Ces femmes devaient donc gérer et développer leurs activités sans aucun recours au crédit bancaire. Elles ne pouvaient s’appuyer que sur des usuriers locaux où les taux d’intérêts pouvaient se chiffrer en 1-2-3% par jour ! Muhammad Yunus décide donc d’avancer de ses deniers personnels cette somme.
Le concept du microcrédit voit alors le jour. Permettre à des populations jugées insolvables ou qui n’ont aucune possibilité d’obtenir des crédits, de développer leurs activités via des prêts de très petits montants. Une petite somme qui transforme une activité plus que précaire en activité rentable sur le long terme. Toute la difficulté sera de mettre en place les structures nécessaires pour organiser cette grande idée. C’est chose faite en 1976 où Muhammad Yunus fonde la Grameen Bank. Cette banque aura vocation à prêter aux plus démunis du Bangladesh.
Certes ce n’est pas la première solution à répondre aux besoins des personnes qui ne font pas parties des critères classiques bancaires, mais c’est sans doute l’une des solutions les plus abouties. Le Mont de Piété permet aussi de laisser un objet en gage contre un prêt. Certaines banques mutualistes ont même vu le jour afin d’aider des personnes jugées autrefois insolvables.
Le microcrédit n’est que l’une des composantes de la micro finance. Cette dernière englobe autant des micro épargnes que des micro assurances, le tout pour des micro projets. Il n’est pas question de créer une société qui embauchera 1.000 chômeurs, mais d’aider 1.000 chômeurs à créer et à développer leurs structures.
Au fil des années, le microcrédit s’est étendu sur la planète, et il apparaît même aujourd’hui dans les pays développés, alors qu’il s’était concentré jusqu’à présent dans les pays en voie de développement. Ainsi, l’ADIE ou Association pour le Droit à l’Initiative Economique aide des chômeurs à créer leurs activités via des micro crédits, comme l’achat d’un scooter ou encore d’une camionnette, voire de financer l’achat d’un permis de conduire, et ce pour des populations qui se sont vues refuser tout crédit de la part des établissements bancaires. L’un des plus grands économistes français, Jacques Attali, est d’ailleurs à la tête de Planet Finance, fondée en 1998, une structure destinée à aider les microprojets, à travers de l’assistance technique par exemple.
Le micro crédit connaît ses heures de gloire avec l’obtention du Prix Nobel de la Paix par Muhammad Yunus, et par l’Année Internationale du Microcrédit décrétée par les Nations Unis pour 2005. Mais le microcrédit n’est pas exempt de critiques. Les taux d’intérêts sont en effet supérieurs aux taux classiques, et certains n’hésitent pas à critiquer des organismes bancaires qui préfèrent prêter peu à beaucoup de monde mais avec un taux d’intérêts élevés. Le microcrédit profite-t-il de la pauvreté ? Pour certaines banques, oui. Mais c’est loin d’être la majorité des projets mis en place. Ainsi plusieurs centaines de millions d’individus de par le monde ont profité de crédits destinés à financer des microprojets.
Après plusieurs décennies, les études ont démontré que le microcrédit permettait l’émergence de projets essentiellement au niveau local et qu’il aidait à la diminution de l’écart de revenus entre les hommes et les femmes. Ces dernières étant plus souvent porteuses de microprojets que les hommes. Si vous souhaitez apporter votre pierre à l’édifice du micro crédit, sachez que plusieurs associations comme l’ADIE acceptent les dons.