Sable, troisième matière première dans le monde

21 octobre 2021 Pierre Perrin-Monlouis

L’eau et l’air sont les deux matières premières indispensables à nos vies. Sans eau ou sans air, nous ne pourrions vivre que quelques minutes. Mais nos civilisations ont développé leur propre dépendance. Désormais, le sable est devenu la matière première indispensable à nos vies quotidiennes, sans même que nous ne le sachions la plupart du temps. Il est en effet présent dans la quasi totalité de nos murs. Sans sable, pas de béton.

Le sable est en effet la troisième matière première la plus utilisée dans le monde après l’air et l’eau. Et elle a l’inconvénient de son avantage : elle est la plupart du temps très peu coûteuse à collecter. Elle ne nécessite pas d’investissements massifs pour en récolter quelques onces et de simples permis d’exploitation permettent d’extraire le sable de la Terre. Cette facilité d’exploitation se combine avec les nombreuses utilisations du sable. Ainsi le sable se retrouve dans les constructions (béton), dans les fonderies (moulage), dans le verre (élément essentiel), même dans l’agriculture pour augmenter le pH ou encore pour… protéger les côtes d’une trop forte érosion. En réalité, il serait presque plus rapide de citer les industries où le sable n’est pas utilisé. Même quand vous restaurez vos volets, le sable est utilisé comme abrasif, et il est aussi présent dans beaucoup de filtres de piscine.

Oui mais voila, les plus fortes réserves de sable du monde sont dans les déserts. Ce sable a été poli durant des siècles par les vents. Il est rond. Il ne s’agrège pas. Autrement dit, personne ne l’utilise, et surtout pas dans la construction. Le sable provient ainsi principalement des carrières de sable mais aussi des fonds marins. Chaque année, 15 milliards de tonnes de sable sont exploités pour près de 75 millions de tonnes de sable marin. Cette surexploitation de la ressource n’est pas sans conséquence. Ainsi on estime que 75 à 90% des plages ont vocation à disparaître. Le sable prélevé dans les océans ne se dépose plus sur les plages, et l’érosion fait le reste. Pour donner quelques ordres de grandeur, pour une simple maison, il faut entre 100 et 300 tonnes de sable. Plus de 30.000 tonnes pour un seul kilomètre d’autoroute. Des projets encore plus pharaoniques sont gros consommateurs de sable. Ainsi à Dubaï, The World et Palm Islands ont respectivement consommé 500 et 150 millions de tonnes de sable à eux seuls. Dans le même esprit, Singapour ne serait pas ce qu’elle est sans le sable tant ses agrandissements ont été possibles grâce à l’apport massif de sable.

L’exploitation des sables marins va sans doute condamner une grande part de nos plages dans les décennies à venir, mais les solutions sont par trop limitées. Certes la construction pourrait être ralentie, mais entraînant avec elle la décroissance de l’économie mondiale. La Chine est ainsi l’un des premiers importateurs pour ses constructions. Dans le même temps, l’Australie engrange quelques 5 milliards de dollars par an, sur un marché du sable estimé à 70 milliards de dollars. Autant dire que l’exploitation n’est pas prête de cesser. Le concassage de roches est bien envisagé pour remplacer le sable, mais le coût est bien supérieur. Le sable n’est qu’en effet qu’un agrégat de près de 180 minéraux, de débris de calcaire ou encore de coquillages et autres coraux. Reproduire cette matière en broyant de la roche est coûteuse, et investir dans des dragues aspiratrices est bien plus économique.

Les risques sont d’autant plus grands que le sable est intraçable. Difficile de connaitre avec précision l’origine du sable, et le pillage est monnaie courante dans ce milieu. Cela ne fait qu’accentuer la pression sur cette matière première.

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Trader & Analyste Financier
Fondateur de Rente et Patrimoine et à la tête du service Bourse Trading, il vous fait profiter de son expérience en trading grâce à ses analyses financières et décrypte pour vous les actualités des marchés. Son approche globale des marchés combine à la fois l'analyse technique et fondamentale.