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Triple A, AAA, Aaa… des pays sans risque

Pierre Perrin-Monlouis Dernière mise à jour: 21 octobre 2021

Il y a encore quelques décennies de cela, les gouvernements n’avaient de comptes à rendre qu’à leurs citoyens, et parfois à des institutions comme pouvaient l’être la Société des Nations. Mais avec le développement de la finance et la mondialisation de l’économie, un nouvel acteur s’est vu doté d’un pouvoir très puissant, l’agence de notation financière.

En effet, depuis la crise pétrolière de 1973, nombreux sont les pays qui affichent de lourds déficits budgétaires. Autrefois financés par des coupes budgétaires ou par la reprise économique, les pays ont choisi depuis la voie de la dette souveraine, et les déficits publics se retrouvent comblés en empruntant sur les marchés financiers. Bien peu de pays affichent aujourd’hui des excédents budgétaires, et certains voient les seuls intérêts de leur dette représentés leur premier poste budgétaire. Le coût des intérêts est supérieur au budget de l’Education Nationale ou encore de l’Armée de certains pays. Cette situation a facilité le développement des agences de notation. Ces dernières étudient désormais avec soin la capacité de chacun des pays à rembourser leurs dettes. Tous les pays sont étudiés. Que vous soyez un pays reconnu pour sa force économique, ou un pays du quart-monde, tous au droit à leur notation financière. Il existe un étalon dans le monde de la notation financière : le Triple A, Aaa, ou encore AAA. Cette note ultime n’est attribuée qu’aux pays où les agences estiment qu’il n’existe aucun risque de solvabilité. Ainsi investir en titres émis par ces pays est sans risque. Cet absence de risques se traduit par un taux d’intérêt des plus faibles. Ainsi point question de prime de risque pour ces pays, ou encore de difficultés à emprunter. A l’opposé, les pays les moins bien notés ont du mal à emprunter et s’ils le peuvent, cela sera dans des conditions financières très coûteuses. Autant dire que le Triple A est synonyme d’économies.

Le monde de la notation financière est principalement dominé par le monde anglo-saxon. Ainsi trois agences se partagent les premières places : Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch Ratings. Leurs notes sont attendues avec impatience, et la dégradation d’une note peut avoir de très lourdes conséquences pour le pays concerné. Deux autres agences se font faits aussi connaître. Rating & Investment Information pour le Japon, et Dagong Global Credit Ratings pour la Chine. La notation peut alors devenir politique et non seulement économique, et la note devient un instrument de guerre géopolitique. La Chine est le principal créancier de la dette américaine par exemple. Une note dégradée, et la Chine pourra exiger un taux d’intérêt plus élevé.

La notation financière d’un pays a pour objectif de fixer un niveau de solvabilité financière. Plus un pays est jugé apte à rembourser ses créanciers, plus sa note sera élevée. L’endettement d’un pays peut être très élevée et la note sera toutefois la note la plus haute. L’agence étudiera ainsi la richesse du pays, son PIB, sa capacité à accroître ses revenus fiscaux. Chaque pays dispose ainsi d’un plafond d’endettement jugé acceptable par les agences de notation. L’endettement est ainsi souvent comparée au PIB d’un pays.

Les Etats-Unis ont été depuis des décennies l’étalon en matière de notation financière. Leur puissance économique permettait d’accepter sa dette colossale. Une dette certes énorme mais avec une très forte capacité de remboursement. Standard & Poor’s a constamment confirmé le Triple A –la note maximale– des Etats-Unis depuis 1941 et la création de l’agence. Mais le vendredi 5 août 2011, Standard & Poor’s annonce officiellement la dégradation de la note des Etats-Unis. Les Etats-Unis perdent leur Triple A. Certes la note des Etats-Unis est confirmée par les deux autres agences de renom, mais cette baisse a créé une onde de choc dans le secteur financier. Cette dégradation s’appuie d’ailleurs davantage sur le risque politique, après les difficultés sur le vote du relèvement de la dette américaine, qu’à un véritable risque financier.

Mais à quoi peut s’attendre un pays qui voit sa note dégrader ?

Une note dégradée et la prime de risque s’accroît automatiquement. Ainsi les prêteurs s’appuyent sur cette note pour proposer des taux plus élevés. Le risque étant plus grand, il est logique que le coût de l’emprunt soit plus élevé. Le pourcentage de non remboursement est en effet plus élevé. Outre ce surcout qui peut se chiffrer en dizaines de milliards de dollars annuels pour les Etats-Unis, les entreprises de ces pays subissent aussi à long terme cette dégradation. Ainsi il est fréquent que les entreprises ne peuvent bénéficier d’une note supérieure à la note de leur pays. Cette note est de plus associée à une perspective. Cette perspective peut être négative, stable ou positive. Autrement dit une note dégradée avec une perspective négative pourra se traduire par une nouvelle dégradation de la note à plus ou moins court terme.

Les gouvernements doivent désormais accepter que ces notes aient un impact sur leurs politiques économiques. Une politique économique mal jugée par les agences et le surcoût de l’endettement risque d’annuler tous les bienfaits attendus de la politique économique. Les agences de notation montrent ainsi leur poids dans l’économie mondiale, bien au-dela des simples marchés boursiers.

Pierre Perrin-Monlouis
Pierre Perrin-Monlouis
Fondateur de Rente et Patrimoine (cabinet de gestion de patrimoine), Pierre Perrin-Monlouis est un analyste et trader pour compte propre. Il vous fait profiter de son expérience en trading grâce à ses analyses financières et décrypte pour vous les actualités des marchés. Son approche globale des marchés combine à la fois l'analyse technique et l'analyse fondamentale sur l'ensemble des marchés : crypto, forex, actions et matières premières.
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